«Je le crois vraiment, il est vital d'aborder chaque jour avec le désir d'être heureux.»
Augustin Paluel-Marmont

Richard Bailly (Atelier d'Ecriture - Nouvelle Librairie) (05 Gap)

261 lecteurs (dont vous) aiment ce texte.
Ce qui devait arriver arriva…

Le récit que faisaient leurs amis de la première rencontre entre Pierre et Pierrette, donnait à penser qu’ils n’étaient vraiment pas faits l’un pour l’autre. Déjà, du fait de leur prénom - ils s’étaient envoyé des vannes toute la soirée - et leur look respectif, avaient donné lieu à de nombreuses remarques, tantôt amusantes, tantôt grinçantes. Pierre de par sa profession était toujours tiré à quatre épingles, costume trois pièces, nœud papillon, pochette assortie, chaussures italiennes. Alors que Pierrette représentait le style gothique à l’état pur, entièrement vêtue de noir, chaussée de rangers et les oreilles et le nez criblés de piercings. La soirée se déroula dans une bonne ambiance malgré tout. Les cocktails et la musique aidèrent les deux jeunes gens à faire plus ample connaissance, et au fond, à commencer à s’apprécier. Ce qui les amena en se quittant à prendre rendez-vous pour une seconde entrevue, mais loin de tout tumulte cette fois-ci.

Ils s’étaient retrouvés ce vendredi soir au bar ‘ Le Chiquito’, seul endroit du secteur où le patron mettait en musique d’ambiance de la salsa cubaine. Musique sur laquelle les deux jeunes gens s’accordaient. Pour ce soir Pierre avait prévu une sortie surprise, et tout en dégustant leur verre de ‘Cuba Libre’, sans dévoiler totalement son projet, il testait Pierrette pour savoir si elle ne craignait pas les surprises, disons, hors du commun. Aux réponses qu’elle lui donna, Pierre fut assuré que le lieu où il avait prévu de l’emmener saurait lui faire plaisir, sinon l’enthousiasmer. Il regarda sa montre qui venait de biper. Vingt heures trente. Il était temps de prendre la route.

Installés dans son magnifique coupé sport, Pierre prévint la demoiselle qu’il y avait une petite demi-heure de trajet pour rejoindre le lieu de la soirée. Sur ce, il mit le contact et démarra. Ils sortirent très vite de la ville par la Nationale, bifurquèrent au bout d’une dizaine de minutes sur une Départementale, qu’ils quittèrent après seulement cinq kilomètres, pour se retrouver sur une petite route de campagne s’enfonçant au cœur d’une forêt domaniale. Arrivés à une intersection, ils prirent un chemin de terre, pénétrant encore plus profondément dans la forêt, jusqu’à arriver devant un vieux portail tout délabré qui leur interdisait d’aller plus loin en automobile. Pierre coupa le moteur, prit une lampe torche dans la boîte à gants, l’alluma, ouvrit sa portière et descendit du véhicule. Il en fit le tour, et ouvrant la portière à sa passagère, l’invita à descendre en lui tendant la main. Le fond de l’air était plus frais qu’en ville et surprit Pierrette qui frissonna. La nuit était déjà bien noire et la fraicheur bien présente. Ayant franchi les ruines du mur d’enceinte de la propriété, ils se trouvèrent devant un vieux manoir dont le perron fendu laissait libre cours à la végétation. Ils firent le tour de la bâtisse et arrivèrent sur les restes d’une chapelle, où gisait en son milieu la cloche que le toit effondré avait laissé tomber. Accolé à ce lieu de prière, un petit cimetière d’une douzaine de tombes contrastait par sa beauté et son parfait entretien. En son coin le plus à l’ouest un somptueux mausolée abritait les défunts propriétaires des lieux.

La surprise et l’émerveillement se lisaient sur le visage de Pierrette. Elle allait ouvrir la bouche pour questionner Pierre, lorsque celui-ci la devançant, lui posa un index sur les lèvres, lui demandant par ce geste de garder le silence. Il lui prit la main et l’emmena silencieusement devant le mausolée. Il se signa et ferma les yeux. Il lui tendit la lampe torche. Elle s’en saisit et sans faire le moindre bruit, s’écarta du jeune homme et vint lire les noms des défunts et les épitaphes des tombes avoisinantes, laissant Pierre à son recueillement. Toutes ces dernières demeures étaient extraordinairement entretenues et fleuries de frais. A croire qu’un jardinier venait journellement s’occuper du lieu.

Pierrette s’arrêta soudain et s’approcha un peu plus près d’une pierre tombale dont le nom et l’épitaphe l’interpellèrent. Le pinceau de la lampe lui fit apparaître : Sarah VIGOTE 06 Juin 1902 – 15 Octobre 1986 « Quand j’vous disais qu’j’allais pas bien ! ». A la vue de cette phrase la jeune femme éclata d’un rire tonitruant qui déclencha le hululement de deux chouettes perchées juste au dessus d’elle. De peur, elle lâcha la lampe et courut dans le noir en direction de Pierre qui l’attrapa in extremis avant qu’elle ne bute sur un caveau. Elle se réfugia dans ses bras qu’il referma délicatement sur son corps tout tremblant. La tête collée à la poitrine du jeune homme, elle put entendre distinctement les battements précipités de son cœur. Signe qu’elle ne devait pas le laisser indifférent. Elle leva les bras et les mit autour du cou de Pierre et d’une légère traction lui fit pencher la tête en avant. Leurs lèvres se cherchèrent, s’effleurèrent et se joignirent pour un long et tendre baiser.

Ce baiser et le jeu de leurs mains cherchant un passage sous les vêtements, leurs firent monter un désir plus charnel. Le feu aux joues, ils se dirent que retourner en ville serait trop long. Le lieu n’était vraiment pas indiqué pour cela mais au moins ils étaient certains de ne pas être dérangés. Pierre sortit une clé de sa poche et l’inséra dans la serrure de la majestueuse porte en fer forgé du mausolée. Celle-ci s’ouvrit sans un bruit, ils pénétrèrent à l’intérieur et sur le tombeau de marbre blanc s’allongèrent et s’aimèrent fougueusement.

Et ce qui devait arriver arriva… neuf mois plus tard ils étaient trois.

FIN.

A PERDRE HALEINE.

Yvan SESSKI, célèbre réalisateur originaire du pays où la majeure partie des habitants ont leur patronyme se terminant par « SKI, OV ou IEV », avait décidé qu’il tournerait son prochain film en France. Plus précisément à la montagne, mais il ne savait pas encore dans quel massif. Pour l’aider à choisir, il venait de faire appel à un homme très connu dans le métier. Une pointure pourrait-on dire. Il s’agissait de Vincent TIMAITRE, qui de par sa profession voyageait énormément pour le septième art en repérage de lieux extérieurs. La rencontre entre les deux hommes s’était déroulée au vingt deuxième étage de la tour Montparnasse à Paris, dans un climat relativement détendu mais professionnel. La demande du réalisateur russe était très simple. Vincent était chargé de découvrir un alpage où le printemps exploserait à l’image. Car la scène qu’Yvan voulait y tourner se passait obligatoirement au printemps, quand les pâturages sont bien gras et que les fleurs tapissent la montagne de mille couleurs.
Cette mission ne se présentait pas sous les meilleurs auspices. Le temps était compté. Nous étions déjà mi-janvier et le tournage se passerait certainement vers la mi-avril. Vincent n’était pas du genre à se décourager, mais le timing allait être serré. Il sentait bien qu’une course à perdre haleine dans tous les massifs montagneux de France allait démarrer. Et cerise sur le gâteau, il lui fallait repérer un lieu montrant la magnificence de la montagne au printemps, alors qu’en ce moment même une méga dépression déversait des quantités astronomiques de neige sur tout le pays.
Vincent avait passé tout son weekend dans les préparatifs du voyage. Ou plutôt de l’expédition. A priori, tout était prêt : ordinateur, batterie de rechange, appareil photos, cartes détaillées des massifs, sac à dos, vêtements chauds, chaussures de randonnées, il ne manquait rien. Il avait prévu le départ pour le lendemain matin six heures. La bonne heure pour quitter Paris et ainsi éviter les embouteillages. La nuit fut courte et le réveil difficile, mais à six heures pile il était au volant de son 4X4 et prit la route en direction du sud-ouest. Les services de la voirie avaient bien œuvré. Ne subsistait des dernières chutes de neige que quelques bourrelets sur les bas-côtés. Si tout ce passait bien Vincent dormirait dans les Pyrénées ce soir.
D’ouest en est, d’adret en ubac, de montées en descentes, de sommets en vallées, de tôt le matin à tard le soir, Vincent mit pratiquement quinze jours pour traverser le massif Pyrénéen. Mais hélas, il n’avait pas repéré le lieu attendu par Yvan SESSKI. Partout où ses pas l’avaient mené, on pouvait poser la caméra et attendre l’expression : « Moteur, ça tourne ! », mais chaque fois un détail s’inscrivait mal dans le paysage. Là un arbre mort au mauvais endroit, ici une forêt de sapins trop dense, ou encore une construction en ruine masquant la vue. Il fallait se rendre à l’évidence, les Pyrénées ne verraient pas le tournage du futur film du réalisateur russe. « Dommage ! se dit Vincent, j’avais trouvé un super resto qui sert une garbure à tomber ! » Il allait donc reprendre sa course effrénée en direction cette fois-ci du massif central. Région qu’il traversa quasiment au pas de charge, se permettant seulement un arrêt buffet dans un petit village de l’Aubrac où il dégusta un merveilleux aligot. Ses recherches ici aussi se soldaient par un échec. Non pas que les lieux visités ne soient pas beaux, mais son imagination lui présentait des décors beaucoup plus majestueux.
Il se dirigea donc vers les Alpes. Savoie et Haute-Savoie furent les premiers départements où il posa son sac. Le repérage allait certainement durer un bon bout de temps, tant les paysages des massifs de ce coin de France étaient d’une beauté à couper le souffle, avec leurs sommets dépassant fréquemment les trois mille cinq cents mètres d’altitude, voire les quatre mille, et portant des noms mondialement connus. La vallée de Chamonix le retint un moment. Car il en profita pour rendre visite à une vieille connaissance des bancs de la fac installée dans le secteur, et par la même occasion s’allouer une petite pause dans sa course. Ce qui lui permit avec son ami de ne pas déroger à la traditionnelle raclette arrosée d’un bon Aspremont de Savoie. Mais ici aussi il ne trouva pas le lieu qu’il pensait le mieux représenter un printemps montagnard. Ces paysages étaient trop minéral. « Trop de roches et pas assez de verdure ! » se dit-il.
Il reprit donc son bâton de pèlerin, ou plutôt son 4X4 de pèlerin, en direction du Vercors. Il y découvrit des lieux de toute beauté, mais malheureusement trop difficiles d’accès pour une équipe de cinéastes et un troupeau de mille brebis. A la vue de ces coins reculés, il comprit que les maquisards qui s’y étaient regroupés lors de la seconde guerre mondiale aient été si compliqués à déloger par l’ennemi.
Vincent ne s’avouait pas vaincu mais le temps pressait de plus en plus. Cette course de repérage l’amenait maintenant dans un coin du pays cher à son cœur. Les Hautes-Alpes. Sur la route lui étaient revenus en mémoire des paysages de son enfance. Tous les étés jusqu’à ses dix sept ans, il les avait passés chez ses grands-parents dans le Dévoluy. « Bon sang, mais c’est bien sûr. C’est là-bas que je trouverai LE décor ! Quel couillon je suis ! Pourquoi n’y ai-je pas pensé plus tôt ? » S’écria-t-il en donnant un brusque coup de volant, qui failli l’envoyer lui aussi dans le décor. Cette route qu’il avait tant prise avec son grand-père, « pépé Mimile » comme il l’appelait avec tendresse, lorsque celui-ci venait le chercher à l’arrivée du train de nuit en gare de Veynes, dans sa vieille Renault 4L fourgonnette. Avec à son bord son fidèle Arkan, un beau berger allemand croisé lévrier qui ne le quittait pas d’une semelle.
Le col du Festre passé, le Dévoluy s’offrait à la vue de Vincent. Et là, un déclic se fit dans son cerveau. Comme une évidence. Le lieu tant recherché ressurgissait de ses souvenirs. « Bien sûr ! La combe du père Arnaud. Ce magnifique pâturage au pied du Pic de Bure ! C’est là qu’on doit tourner la séquence ! » Se dit-il. Arrivé sur place, il n’eut pas de mal à reconnaître l’endroit. Rien n’avait changé. Ce beau vallon montant en pente douce mais régulière jusqu’au pied de cette falaise très connue dans le monde de l’escalade et de l’astronomie. Il posa mentalement les caméras, une à la montée, une autre en contre-champ. Ce qui permettrait d’avoir tout le troupeau en un seul plan séquence. « Parfait ! Comme ça on aura toutes les brebis à l’image montant à l’estive, attendues par la tondeuse pour leur faire perdre la laine ! » Se dit-il.
FIN.

LE PODIUM

Estrade composée de trois marches, qui chacune peut accueillir au minimum une personne ou une équipe plus ou moins grande selon le sport pratiqué. Cet équipement est le plus souvent utilisé à la fin d’une épreuve sportive, pour la remise par un représentant officiel de médailles ou de coupes célébrant la victoire. La plus haute, située au centre et numérotée 1 y accueille le vainqueur, vient ensuite la numérotée 2, un peu moins haute, où monte le vice champion et enfin la troisième, encore moins haute, qui cela allant de soi y voit monter le troisième de l’épreuve. Malheur au quatrième qui lui se verra décerner la médaille en chocolat et restera au pied.

LE PANIER

C’est un article très utile pour qui veut faire ses courses ou transporter marchandises ou menus objets, sans recourir aux vulgaires sacs plastiques, coupant les doigts et polluant notre bonne vieille terre. Généralement tressé en osier, il peut être carré, rond ou ovale, avec une anse ou deux poignées, et de multiples capacités.
‘’Le panier moyen de la ménagère‘’ pour une étude économique vous indique la somme moyenne dépensée lors d’achats.
‘’Le panier de crabes’’ se dit d’un groupe de personnes n’hésitant pas à se marcher dessus et à écraser les autres pour se faire leur place au soleil.
‘’Le panier de Y…..T’’ célèbre dessert lacté aux morceaux de fruits.
‘’Le panier garni’’ à gagner lors des tombolas ou lotos.
‘’Le panier de pic-nic’’ avec tout ce qu’il faut dedans pour un repas en famille ou entre amis, au bord de l’eau ou à la campagne.
‘’Le panier de basket’’, mais celui-ci à la différence des autres n’a pas de fond, et laisse imperturbablement tomber le ballon, ce qui fait s’additionner les points pour l’équipe la plus adroite.
‘’Le panier à salade’’ qui vous transporte avant de vous faire secouer au poste de police.
‘’Le panier percé’’ lorsque vous êtes sujet à des fuites de liquidités.
‘’La main au panier’’, vulgaire ou flatteuse. C’est vous qui voyez.
‘’LE PANIER’’, le plus vieux quartier populaire très connu de la ville de Marseille situé dans le centre ville et proche du vieux port.
En fait, à chacun le sien.

« Je n’ai rien oublié ! »

Justine avait réussi, non sans mal d’ailleurs, à faire accepter l’idée à son mari, qu’il était grand temps de vider les placards du salon. Ceci afin de faire un tri sévère, car les « ça on garde, ça peut toujours servir » empêchaient la fermeture normale des portes et tiroirs. Il fallait souvent s’y reprendre à trois ou quatre fois pour que ces meubles, d’apparence inoffensifs, ne vous renvoient pas une porte mal fermée dans la figure, ou qu’un tiroir récalcitrant ne vous coince pas les doigts suite à une poussée trop brusque. Il était donc acté que ce vendredi trois juillet verrait, non pas un vide grenier, mais un vide placard chez Justine et Fernand.
Ils s’y attaquèrent avec entrain et détermination et s’étaient armés pour l’occasion de sacs poubelles de grande capacité. Le très grand bahut vaisselier fut vidé très rapidement des objets non nécessaires à son usage premier, car que pouvaient bien faire au milieu des assiettes, soupière, saucière, carafe, verres à eau, à vin, flûtes à champagne, tasses et sous-tasses, des choses comme, des tournevis, deux pelotes de laine piquées d’aiguilles à tricoter, des livres, des produits de nettoyage, des boîtes de conserves diverses et variées, un clavier d’ordinateur, un vieil appareil photo, des boules de pétanque et, cerise sur le gâteau, un moteur de trottinette électrique ?
En débarrassant tout ce fourbi, Fernand retrouva l’album photos de leur mariage. Il s’en saisit et alla s’asseoir dans son fauteuil. Il invita Justine à faire une pause et à feuilleter avec lui l’album souvenir du jour où ils s’étaient mutuellement dit oui pour la vie. Les photos leur faisaient remonter des souvenirs à la mémoire. « Tu te souviens ! dit tout à coup Justine, le malaise des invités lorsque mon père, dans son discours, nous a décrit les positions sexuelles que nous ne manquerions pas de tester ! » « Oh que oui, et on en a testé bien d’autres ! lui répondit Fernand sur un ton plein de lubricité. « Et le tonton Jean-Jacques qui avait commencé l’apéro bien avant tout le monde et qui s’est ramassé une belle gamelle dans l’escalier de la mairie ! » ajouta-t-elle. « Il n’y avait pas que lui d’ailleurs à avoir goûté le vin d’honneur avant les autres, rappelle-toi mon témoin Daniel, le mal qu’il a eu à sortir les alliances de sa poche de pantalon et qui en même temps disait à qui voulait l’entendre : scuuuuuseeeez-moi, Hips, c’est l’pantaaaaaaaaalon qu’est trop serréééé Hips ! » renchérit Fernand.
Se levant de l’accoudoir du fauteuil de son chéri, où elle avait pris place le temps de ce plongeon dans l’album, Justine se dirigea vers la grande baie vitrée du salon qu’elle ouvrit des deux battants. Elle en franchit le seuil et se trouva sur la terrasse surplombant le jardin. Elle s’arrêta au bord, huma longuement les yeux fermés l’air chaud empli de senteurs estivales et, rouvrant les yeux, contempla pendant plusieurs minutes l’explosion de couleurs que donnaient les fleurs plantées en massifs sur cette pelouse incroyablement verte pour un début juillet. Elle demanda à Fernand de la rejoindre. Lorsqu’il fut près d’elle, elle lui dit : « Et toutes ces fleurs et plantes en pot qui nous ont été offerts pour ce magnifique évènement. On se serait cru dans l’arrière boutique d’un fleuriste tant il y en avait. On en a replanté pas mal, et ma foi, elles ont l’air de se plaire dans notre jardin. Pour preuve, regarde ces deux superbes hortensias. Un à chaque coin de la terrasse. Un bleu et un rose pour signifier le masculin et le féminin. Ils ont neuf têtes chacun, comme le nombre de nos années de mariage. Ils sont de toute beauté ! » « C’est vrai ! » Répondit Fernand. « Ça me fait d’ailleurs penser que j’ai failli rester sur le trottoir à la sortie de l’église. Tout le monde s’était occupé de charger plantes et bouquets dans les voitures, tant et si bien qu’il n’y avait plus de place pour le marié ! » Ajouta-t-il en souriant.
« Et au restaurant, tu te souviens de la pagaille que ça a été. On a eu le malheur de ne pas faire de plan de table. Malheur à nous ! » S’écria-t-elle. « Oui ! lui répondit Fernand, il y en a même deux ou trois qui ont failli se battre ! » « Je n’en étais pas fière. Tout ça parce que deux de mes cousins avaient repéré une cousine à toi qui avait l’air chaude comme une baraque à frites et qui voulaient se mettre à côté d’elle à table ! » Ajouta-t-elle.
Pendant ce temps, le ciel s’obscurcissait. De gros et lourds nuages noirs commençaient à apparaître, poussés par de fortes rafales de vent. A n’en pas douter, un orage se préparait. Fernand le fit remarquer à son épouse qui embraya sur une nouvelle anecdote : « Ah ben oui tiens. L’orage qui a éclaté au début de la soirée dansante. Il a tout fait disjoncter. Plus de son plus de lumières. Et ton père qui s’improvise électricien à la recherche du compteur électrique. Il trouve le disjoncteur, remet le courant en même temps qu’un éclair jaillit à une dizaine de mètres de la salle. On a entendu un gros boum, un cri, et on a vu ton père revenir les cheveux hirsutes et l’air hébété. Il s’est dirigé comme un zombie vers le bar, sans dire un mot il s’est servi une méga dose de calva, l’a bue cul-sec, nous a tous regardé et a déclaré solennellement ‘’Sacré châtaigne !’’ »
Quelques gouttes commencèrent à tomber sur la terrasse, que le couple prit comme signal de se mettre à l’abri. A peine rentrés, un éclair zébra le ciel noir, donnant un effet stroboscopique et un tonnerre assourdissant se fit entendre aussitôt. Preuve que l’orage était juste au dessus. Ce qui fit dire à Fernand : « Pareil qu’à notre mariage, mais aujourd’hui le déluge n’effrayera pas les enfants de ta sœur. Ils avaient eu tellement peur qu’on les avait retrouvés tout tremblants sous les lavabos des toilettes ! » « Tout à fait ! » Lui répondit Justine.
« Tu vois, je n’ai rien oublié de cette si belle journée. Même pas la date. Toi qui dit toujours ‘’ Vous les hommes, les dates d’anniversaires il faudrait vous les tatouer sur le bras pour na pas que vous les oubliiez’’ ! » « Et ça tombe quand cette année ? » Lui demanda malicieusement sa femme. « Comme si on pouvait oublier une telle date. Anniversaire international qui plus est. Le jour de la fête d’indépendance des états unis d’Amérique ! » Répondit-il. « D’accord, mais c’est quand donc ? » fit Justine d’un air mutin. Fernand s’approcha d’elle, la prit doucement dans ses bras et lui murmura à l’oreille : « C’est le quatre Juillet, c’est demain ! » puis il posa ses lèvres sur les siennes et l’embrassa tendrement.
FIN

VERTES PRAIRIES

« Oh la vache, la vache ! » s’écria César, en remontant précipitamment sur son tracteur. Un vieux Massey Fergusson rouge délavé des années soixante qui faisait sa fierté, car ce vieux tacot - comme il aimait à l’appeler - tournait comme une horloge. « Faut que j’prévienne Marguerite ! » se dit-il, tout en démarrant en direction de la ferme éloignée d’à peine deux cents mètres. Il stoppa son véhicule en catastrophe, manquant par la même occasion d’écraser une poule qui grattait la terre de la cour à la recherche d’un hypothétique ver. Arrivé à la porte de la cuisine qu’il ouvrit avec fracas, il se mit à crier : « Marguerite, elle s’est sauvée ! » « Qu’est-ce que tu m’chantes là vieux fou ! Tu vois bien que j’suis là, j’suis pas sauvée ! » s’exclama sa femme debout devant la cuisinière, déjà occupée à la préparation du repas de midi. « Mais non, pas toi ! lui répondit César, toi t’es ma Margot, j’te parle de la vache Marguerite, elle a cassé la barrière de l’enclos, elle est plus dans l’pré ! Faut partir à sa r’cherche, coupe ton gaz et mets tes bottes, je pense savoir où elle est ! » « Et où crois-tu qu’elle est partie c’te bête ? » lui demanda sa femme. « J’pense qu’elle a fugué dans l’champ au Jules, elle a des copines là-bas. T’es prête ? On y va ! » ordonna t’il.

Le champ du père Jules était mitoyen de celui de César, mais pour y accéder il fallait faire un grand détour, par un chemin dont l’étroitesse ne permettait pas l’emploi du tracteur. C’est donc à pied que César et son épouse se rendirent à ce pâturage, afin d’en ramener Marguerite l’évadée.
Le printemps allait bientôt céder la place à l’été. Les jours avaient bien rallongé et la journée promettait d’être des plus agréables, de par la douceur de l’air et du parfum enivrant qu’exhalaient les fleurs des champs. Les prairies étaient bien vertes en cette fin mai et le travail de fauchage n’allait pas tarder à commencer.

César et madame, accompagnés par le gazouillis des oiseaux, occupés à construire le nid qui allait bientôt protéger leur future nichée, arrivèrent après quinze minutes de marche, à la chaîne qui interdisait au troupeau du père Jules la sortie sans autorisation de sa part. Chaîne qui pour plus de sécurité était doublée d’un fil électrique relié à une batterie. César vit les vaches rassemblées autour de la vieille baignoire servant d’abreuvoir et se mit à appeler "sa" Marguerite. Au bout de cinq minutes, il dut se rendre à l’évidence, elle ne faisait pas partie du groupe, et d’ailleurs comment aurait-elle pu entrer dans le champ, la chaîne était toujours en place. Se demandant où diable elle avait bien pu passer, ils reprirent leurs recherches en suivant le chemin qui menait à une clairière avec en son centre un énorme rocher. « On va s’asseoir deux minutes ! » dit-il à sa femme.
Tous les deux s’assirent dans l’herbe au pied du rocher, et goûtèrent pleinement le calme de la campagne environnante. Soudain, César remarqua un bruit d’eau. Intrigué il se leva et commença à faire le tour du roc, et découvrit avec stupéfaction Marguerite se désaltérant à une source jaillissant de la pierre. « Vain de Diousse ! s’écria-t-il, Margot viens donc voir par là, on l’a retrouvée ! » Sa femme accourut et stoppa net devant le tableau qui lui était donné de voir. En effet, la vache buvait à la source, mais debout sur ses pattes arrières, les pattes avants appuyées sur la paroi rocheuse et avait l’air de se délecter du breuvage. César allait passer un bout de corde autour du cou de sa vache lorsque celle-ci fit une ruade et partit en titubant sévèrement. « Qu’est-ce qu’elle a ? on dirait qu’elle est bourrée ! » s’étonna-t-il. Tout à ses pensées il remarqua que la source chuintait étrangement et qu’une odeur de raisin s’en échappait. « Bizarre c’t’affaire ! se dit-il ». Il mit ses deux mains en coupe et les porta sous le liquide afin d’en remplir le creux. Il y trempa ses lèvres et brusquement son visage s’éclaira. « Ah ben v’là aut choses, c’est y pas du champagne qui coule de la pierre ? » se demanda-t-il à haute voix. Sa femme aussi surprise que lui fit de même et en vint à la même conclusion que son époux. C’était bien une source de champagne.
Quel magicien farceur avait eu l’idée de faire jaillir une telle source ici ? Alors que le plus proche vignoble qui laissait voir ces ceps bien alignés était distant de plus de deux cents kilomètres. Mystère.
Bon ce n’était pas tout ça, mais il fallait récupérer Marguerite et la ramener à l’étable pour la traite. Dieu sait quel goût aurait le lait ce matin. Après trois quarts d’heure à lui courir après, le couple réussit enfin à lui passer le bout de corde autour du cou et à la calmer tant soi peu. Maintenant direction la ferme, en espérant ne croiser personne afin d’éviter les questions et les quolibets qui ne manqueraient pas de fuser à la vue de la vache ivre. Le chemin avait l’air plus long et plus fatiguant qu’à l’aller. Ce n’était pas un long fleuve tranquille tant Marguerite faisait des zigzags entrecoupés d’embardées et de cavalcades à perdre haleine. Mais la ferme était en vue avec à la clé la fin de cette pittoresque aventure pensait César.
Arrivés tant bien que mal dans la cour, les deux Marguerites se dirigèrent chacune vers leur lieu de prédilection, c'est-à-dire pour l’une, sa cuisine, et pour l’autre, la salle de traite. César entra tout essoufflé dans cette grande pièce attenante à l’étable et commença à préparer le matériel, lorsqu’une voix inconnue lui dit : « Dépêchez-vous un peu que diable. Ce n’est pas du lait que je vais vous donner mais du beurre ! » César, de stupeur mêlée d’incompréhension, en laissa tomber le seau qu’il avait à la main et regarda sa vache d’un air interrogateur. « C’est toi qu’à parlé ? » lui demanda-t-il. « Indubitablement ! lui répondit-elle, le champagne doit avoir cette vertu sur le monde bovin. En tout cas cela fonctionne sur moi ! » « Ben nous v’là beaux ! fit César en réponse. On avait déjà la vache qui rit, maintenant on a la vache qui parle ! » « Aléa jacta est ! » Lui rétorqua Marguerite en lui lançant un clin d’œil complice.

FIN

LE LIVRE ( Version n°2 - le 19/11/20 )

Des feuilles de papier reliées entre elles, avant avec de la ficelle, maintenant avec de la colle. Le tout dans une couverture plus ou moins épaisse, semi rigide, plastifiée ou non, en carton fort, ou en cuir pleine fleur, avec écrit dessus un titre, un nom d’auteur, et une maison d’édition, comme un slogan publicitaire pour attirer le lecteur.
Et lorsqu’on ouvre ce rassemblement de feuilles numérotées à chaque bas de page, que de lettres assemblées les unes aux autres! A y regarder de plus près forment des mots, puis des phrases, des paragraphes et des chapitres, le tout donnant en fin de compte un récit, une histoire, des formules, voire même des recettes. Certains sont aussi agrémentés de dessins, de croquis et de photos. A la sensation du toucher lorsqu’on feuillète les pages s’ajoute celle de l’odeur de l’encre, et voici que l’ouïe intervient aussi avec les livres audio.
Un livre est une clé qui vous ouvre les portes de l’imagination et vous invite aux voyages, alors rien de mieux pour s’évader car lire des livres délivre. Vous vous retrouvez dans des mondes créés par un auteur et mis en scène par votre cortex cérébral où vous pouvez remplacer le héros le temps d’une lecture. Ce peut être aussi un puits de connaissances et d’informations, où y plonger ne provoquera en vous que de bonnes choses dont une d’importance : la culture.

Nathalie, le 22/12/20 : De mieux en mieux Richard ! Tes textes sont de plus en plus fluides, agréables à lire... Bravo ! ;)

Nathalie, le 03/12/20 Très beau Richard... Et franchement, même si on peut toujours reprendre une phrase, remplacer un mot, etc. pour alléger, peaufiner et re-peaufiner un texte, tel quel ton texte est déjà bien ficelé, vraiment agréable à lire ! Bravo !!

Nathalie, le 23/11/20 Que de rebondissements dans cette belle nouvelle "vert prairie". Les personnages sont tous les trois attachants et le décor est bien planté !!
Quelle imagination ! Une proposition pour que ton histoire frôle une vérité possible : faire manger des pommes avariées à ta vache (ça peut la saouler aussi sauf erreur ?) et faire boire ensuite un peu (beaucoup) d'eau de vie à ton César, ce qui expliquerait ses hallucinations soudaines, et son imagination le portant à croire que "la vache qui rit" soit soudain "la vache qui parle" !

Richard, le 22/11/20 "Au féminin la verte prairie, au masculin le pré vert." Salutations Jacques!

Nathalie, le 19/11/20

Richard, tu as vu/entendu que la ponctuation modifiait, améliorait ton texte !
A présent, il faut que tu lises à haute voix (pour entendre la musique de tes phrases), la fin de ton texte :
Ta phrase “A se retrouver” ne parvient pas à se raccrocher au texte avant ou après : Sujet, verbe, complément ? Normalement tu entends à l’oreille, si tu lis la phrase juste avant, puis celle-ci, qu’il y a comme un décrochage. J’imagine que tu veux dire quelque chose comme “L’auteur du livre vous emporte dans les mondes qu’il a créés, dans les situations qu’il a imaginées, mises en scène, mais au fil de votre lecture, votre cortex cérébral s’affirme parfois dans sa singularité et crée ses propres héros qui se superposent et remplacent les siens.”
La phrase suivante mériterait aussi quelques ajustements. Elle pourrait se couper en deux, et cela pourrait donner (en évitant l’emploi du “y”) : “Le livre peut être aussi... d’informations. Se plonger dans sa lecture....la culture.”

Nathalie, le 18/11/20 Belle description du livre ! Je proposerais essentiellement des ajustements au niveau de la ponctuation :
*comme après "d'édition", où plutôt qu'un point-virgule, je mettrais une virgule. Je mettrais aussi un point d'exclamation après "les unes aux autres", et je reprendrais ensuite de la façon suivante "A y regarder de plus près, elles forment des mots..." et ensuite je placerais une virgule plutôt qu'un point après "chapitres", etc.
* Pourquoi "Ainsi" 5 lignes avant la fin ?
* revoir la formule "où vous y jeter"

mis à jour le